Film : Matrix (1999)


Dix ans après la trilogie « Matrix », le premier volet semble toujours d'actualité.
Par exemple, on a vu des philosophes s’emparer de "Matrix" pour essentiellement deux raisons: les auteurs du film, les frères Wachowski, sont eux-mêmes, des lecteurs de Platon ou de Jean Baudrillard et revendiquent une dimension intellectuelle au delà des scène de combat; la philosophie dont J.F Revel avait prononcé l’acte de décès, trouve avec le cinéma (au moins depuis les textes de Deleuze), un moyen de survivre sous forme de critique littéraire, notamment en recyclant ses vieux mythes (comme l’allégorie de la caverne de Platon). Les disciples de Lacan, comme le Slovène Slavov Zizek, prétendent que c’est une œuvre inspirée des concepts de leur maître à penser, d’autres comme Alain Badiou, le philosophe de l’ultra gauche, s’y intéressent car ils y trouvent probablement une critique marxiste du capitalisme.

Matrix (en France) ou La Matrice (au Québec), (The Matrix) est un film de science-fiction, un « cyberfilm», réalisé par Andy et Lana Wachowski et sorti en 1999. Il est le premier volet d’une trilogie qui se poursuivra avec les films Matrix Reloaded et Matrix Revolutions. Il est l’un des films du genre le plus important de son époque.



Synopsis

Thomas A. Anderson, un jeune informaticien connu dans le monde du hacking sous le pseudonyme de Néo (Préfixe grec signifiant « nouveau » et anagramme de (The) One en anglais, signifiant « l'Élu » ), est contacté via son ordinateur par ce qu’il pense être un groupe de hackers informatiques. Ils lui font découvrir que le monde dans lequel il vit n’est qu’un monde virtuel dans lequel les êtres humains sont gardés sous contrôle.

Morpheus, le capitaine du Nébuchadnézzar, contacte Néo et pense que celui-ci est l’Élu qui peut libérer les êtres humains du joug des machines et prendre le contrôle de la matrice (selon ses croyances et ses convictions).

Résumé du contexte

L'apparition des robots, au service de l'homme puis de l'Intelligence artificielle, a entraîné une confrontation entre Humains et Machines Page d'aide sur l'homonymie, lesquelles ont finalement fabriqué leur propre domaine et concurrencent directement celui des humains. Cette confrontation s’est intensifiée lors du jugement d’un robot pour meurtre, de la haine grandissante contre eux et lors de la création d'un état uniquement dédié aux robots dans le Moyen-Orient qui a fait basculer l'économie mondiale (voir Animatrix).

« Nous vous l’avions bien dit, ça devait arriver : à force de produire des machines pour vous servir, vous êtes devenus vous-mêmes les esclaves de vos instruments. »

— Patrice Maniglier, « Mécanopolis, Cité de l’avenir »

Voyant leurs forces diminuer au fil du temps, les Humains ont recouvert la terre d'un épais nuage, provoquant un « hiver nucléaire », empêchant ainsi les rayons du soleil (la seule source d'énergie abondante utilisable par les Machines) de passer. Les Machines ont donc dû chercher une nouvelle source d'énergie et ont tourné leurs recherches vers la bio-électricité. Une fois la victoire acquise, les machines ont fabriqué les tours nécessaires au fonctionnement et à la maintenance de leurs générateurs, et se sont assurées d'une production régulière d'humains en les cultivant et en les conservant dans des cocons remplis d'un liquide nutritif. Une fois le cocon connecté sur une tour, les câblages permettent de fournir l'air à l'humain ainsi que de renouveler le liquide nutritif, et à prélever sa bio-électricité. Le problème, c'est qu'emprisonnés de la sorte, les Humains ne fournissaient pas assez d'énergie. Les Machines ont donc créé la Matrice, sorte d'univers virtuel dans lequel les Humains s'épanouissaient, assurant une quantité d'énergie considérable aux Machines. Les humains n'ont donc pas conscience de la réalité et du « monde qu'on superpose à leur regard ».

« La Matrice est universelle. Elle est omniprésente. Elle est avec nous ici, en ce moment même. Tu la vois chaque fois que tu regardes par la fenêtre, ou lorsque tu allumes la télévision. Tu ressens sa présence, quand tu pars au travail, quand tu vas à l’église, ou quand tu paies tes factures. Elle est le monde, qu’on superpose à ton regard pour t’empêcher de voir la vérité. »
— Laurence Fishburne, Matrix, 1999, écrit par les Frères Wachowski

Mais cette Matrice contient différents bugs, dont l'apparition d'un homme qui peut jouer avec les règles de ce monde virtuel. Cet homme est considéré comme un Élu par les quelques milliers d’humains qui ont pu survivre dans le monde réel, cachés sous Terre dans la ville de Sion Page d'aide sur l'homonymie. Les Humains voient en l’Élu le sauveur de l’humanité.
« N'envoyez jamais un humain faire le travail d'un programme. »
— Hugo Weaving, Matrix, 1999, écrit par les Frères Wachowski

Technique

Ce film fut considéré par le grand public comme une véritable révolution. Sur le plan esthétique, son emploi intensif d’une technique de tournage (existant antérieurement mais assez peu utilisée) : le bullet time, effet de « caméra mobile » (une série d'appareils photo disposées en cercle) autour d’un sujet en mouvement ralenti, a séduit les spectateurs. Cette technique inventée par Emmanuel Carlier en 1995 fut utilisée par Michel Gondry dans une publicité pour Smirnoff en 1997, la première utilisation au cinéma fut sans doute dans Perdus dans l'espace (Lost in Space) de Stephen Hopkins (1998). De nombreux éléments graphiques ont été repris de Ghost in the Shell de Mamoru Oshii, notamment le générique.



Sur le fond, cependant, aucun des éléments pris séparément n’est proprement révolutionnaire. La manière de filmer est très inspirée du cinéma de Hong-Kong et de John Woo, les thèmes sont des classiques du cyberpunk, avec des éléments de Tron (Steven Lisberger, 1982, le nom de M. Anderson étant le nom d’un programmeur dans l’histoire de Tron) et de Terminator (James Cameron, 1984) pour le thème central (les machines dominant le monde dans le futur).

Interprétations

La science-fiction est qualifiée de « révélateur », dans le sens où elle retranscrit les « fantasmes », « questions » qui se développent parallèlement aux avancées, aux progrès des sciences, mais aussi en même temps que l’évolution des lois et des mœurs.

« The Matrix est la saga qui va marquer, comme Star Wars ou Dune. Même mélange universel de philosophie, de culture ancienne, de légendes et de mythes. Même grosse soupe spirituelle d’où doivent émerger un leader guerrier, un élu noble, sa fiancée, une prophétie, une entité ennemie, une rébellion, une guerre »

— Voir, 15 mai 200312

Des articles de presse ont souligné lors de sa sortie, la récupération ou l'utilisation par Matrix de concepts ou mots existants déjà préchargés de sens et sur lesquels il se greffe : « Morpheus » (Morphée divinité des rêves, donc de l'illusion), le lapin blanc de Lewis Carroll, la notion d’éveil inspirée du bouddhisme, la Bible (messianisme avec l'élu, les noms « Nebuchadnezzar » et « Zion » sont les transcriptions phonétiques anglaises de « Nabuchodonosor » et « Sion ». « Trinity » et la Trinité)...

Il peut être vu d'un œil dénonçant une élite dominant le monde, dans la mesure où, la matrice contrôlée par les machines représente le contrôle de notre société actuelle par une élite.

Elle peut aussi bien être considérée comme une reprise adaptée au monde moderne du concept hindouiste de la mâyâ et de l’allégorie de la caverne de Platon, où le monde que nous voyons ne reflète que les ombres du réel.

« cinéma pour préparer à Platon, aurait dit Pascal, s’il avait su »
— Matrix, machine philosophique, Alain Badiou, p. 129

Cette adaptation est un thème qui a souvent été abordé par la science-fiction de la seconde moitié du XXe siècle.

Matrix ou le sablier de nos représentations
IMDB : The Matrix 1999
Wikipedia - Matrix
Matrix : Analyse Philosophique
Matrix, une analyse de la trilogie
La connaissance selon MATRIX
(Traduction du texte d'Erik Davis, 21 mai 2003)
Analyse - Matrix
Réveille-toi ! Le gnosticisme et le bouddhisme dans Matrix
Frances Flannery-Dailey et Rachel Wagner

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